DEUXIÈME PÉRIODE

(1936 / 1945)

1936

Arno Breker remporte la médaille d’argent au concours ouvert à l’occasion des Jeux Olympiques de Berlin, pour ses deux sculptures Athlète de décathlon ("Zehnkämpfer" ) et  Victoire ("Die Siegerin").

Brève altercation avec Hitler, venu salué les lauréats du concours.

1937

Breker est nommé professeur à l’Ecole des Arts Plastiques (Der Hochschule für Bildende Künste) de Berlin. Il épouse Demetra Messala, dont il a fait la connaissance à Paris.

Le Ministère de l’Education et de la Propagande lui passe commande d’un Prométhée présenté à Munich, lors de l’inauguration de la Maison de l’Art Allemand.

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Charlotte Breker - Düsseldorf - Germany.

 

1938-1939

Albert Speer confronté à un problème d’aménagement de la Cour d'Honneur de la Nouvelle Chancellerie, dont Hitler lui a commandé la construction, fait appel à Breker. Celui-ci dessine deux statues destinées à orner le monumental portail d’entrée (« Le Porte-glaive » et « Le porte-Flambeau »), ainsi que deux bas-reliefs (« Combattant » et « Genius ») et cinq statues pour la Rotonde.

 
L'objet du «crime» ? Les statues pour la rotonde

1938-1939

Tandis que Hitler confie à Speer le soin de lui soumettre un projet de reconstruction de l’ensemble du centre-ville de Berlin, Breker reçoit d’importantes commandes : vingt-quatre bas-reliefs de dix mètres de hauteur chacun pour l’Arc de Triomphe (Breker en réalisera une partie) ainsi qu’un prodigieux ensemble de sculptures destinées à orner le grand bassin d’Apollon et la Grand-Place - en tout, près d'une cinquantaine de statues dont deux de quinze mètres de haut pour l'entrée du Grand Dome.
    Pour ce faire, Breker installe ses ateliers à Jäckelbruch, au nord de Berlin.  

1942

A l’invitation de Jacques de Benoist-Méchin, Breker expose une partie de ses œuvres (dont Blessure) à l’Orangerie des Tuileries, à Paris. De nombreuses personalités assiste à l’inauguration, parmi lesquels : Aristide Maillol, André Dunoyer de Segonzac, Drieu la Rochelle, Sacha Guitry, André Derain et surtout Jean Cocteau qui, après avoir traîné les pied pour se rendre à l’exposition, en revient enthousiaste et se lie durablement d’amitié avec Breker.

 1943

Exposition à Cologne. Achèvement du buste de Maillol.

1944

Exposition à Postdam. Breker réalise l’un de ses plus beaux bas-reliefs de cette époque : Orphée et Eurydice.

1945

Les trois ateliers berlinois de Breker sont réquisitionnés et leur contenu soit confisqué au titre de „butin de guerre », soit purement et simplement détruit à coups de bulldozer. Plus de 80% des oeuvres de Breker disparaissent ainsi. Les œuvres exposées à l’Orangerie, qui avaient été laissées sur place, disparaissent également. Elles seront retrouvées au début des années 60 dans une fonderie et vendues au « poids ». Au terme d’une loi de 1947, il sera même interdit à Breker de les racheter. Néanmoins, par l’intermédiaire d’une amie suisse, Edwige Soder, il parviendra malgré tout à en récupérer certaines, qu’il fera installer par la suite dans le parc de sa résidence de Düsseldorf.

Breker ne fera l’objet d’aucune poursuite après guerre, n’ayant même jamais adhéré au Parti Nazi. Tout juste lui sera-t-il demandé d’exprimer des "regrets" (ce qu’il refusera de faire), pour avoir accepté d’honorer des commandes émanant du pouvoir nazi et sera-t-il condamné comme « suiveur » à 100 marks d’amende.

Première Période (1900/1935)

Troisième période 

 

 

 

 

 

 

 

    Extraits du Journal de JEAN COCTEAU (éditions Gallimard, Paris, 1989)

    Mercredi 6 mai 1942

   Au moment où toute la presse germanophile m'insultait, Arno Breker, le sculpteur d'Hitler, m'a donné le moyen de lui téléphoner par ligne spéciale à Berlin au cas où il m'arriverait quelque chose de grave à moi ou à Picasso.

    Aujourd'hui Breker est à Paris. La France organise son exposition. Ce matin Chardonne m'appelle "au nom du gouvernement Laval." Je suis le seul qui puisse... etc. Comme de juste. Tout le monde est suspect. Ils doivent estimer qu'il n'y a que moi d'assez libre et d'assez fou pour prendre la parole. Et, comme Breker m'a rendu service, je le ferai. Le drame c'est sa sculpture. Elle doit être médiocre.

    Samedi  16 mai 1942

   ... Hier inauguration de l'exposition Breker à l'Orangerie. Discours, uniformes. Statues géantes avec un goût presque sensuel du détail et de l'humain. Les cheveux, les veines. Sacha Guitry me dit : "Si ces statues entraient en érection, on ne pourrait plus circuler."

     Lundi 18 mai 1942

   Ce soir à cinq heures, été chercher Breker au Ritz. Nous allons avec sa femme à l'Orangerie après la fermeture. Sans la foule, les statues vivent. Il faudrait les exposer dehors, à l'ombre, au soleil. Breker est un artisan, un orfèvre, son goût du détail, du relief, s'oppose aux volumes ennuyeux de ses maîtres. Il choquera l'esthétisme. C'est pourquoi je l'aime. Il progresse beaucoup. Sa dernière statue (Blessure) m'étonne par ses veines, par ses muscles, par son réalisme, son plus vrai que le vrai. On devine que tout lui vient du David de Michel-Ange. Je ferai le "salut à Breker". Je lui explique pourquoi je me cabrais contre l'idée d'écrire ces lignes. Mon goût des mauvaises postures. Ecrire avec tous et seul. Breker m'invite à Berlin pour faire mon buste.

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    Extraits de Paris, Hitler et moi d'ARNO BREKER Presses de la Cité, Paris, 1970)

        En automne 1945, je fus convoqué par le directeur de la C.I.C., à Munich.

        "(...) Il faudra que vous supportiez avec résignation le procès de dénazification, me dit-il. Nous poursuivons encore nos enquêtes. Jusqu'à présent, nous n'avons pu retenir aucune charge contre vous. Il n'y a qu'une chose que nous ne pouvons vous pardonner. C'est que vous ayez contribué à la gloire de Hitler sur un plan artistique..."

        Il fit une pause.

        "...J'aimerais vous donner un conseil, me dit-il doucement en me fixant dans les yeux. Repentez-vous publiquement. Comprenez-vous ce que je veux dire?... "

        J'avoue avoir été complètement décontenancé. Son ton de voix était paternel et bienveillant, mais jamais je n'aurais pensé qu'il pût en venir là.

        "Vous êtes extrêmement aimable de me donner ce conseil, et je vous en suis très obligé... Mais pouvez-vous me dire sur quoi il me faut fonder ce repentir...? Ni le hasard ni l'inclination ne m'ont fait revêtir une quelconque charge politique. Je n'étais que sculpteur. Ce métier m'a complètement absorbé et je l'ai assumé en mon âme et conscience, avec toute ma responsabilité, sans jamais souffrir d'influences extérieures. Vous avez laissé entendre que j'avais contribué à la gloire d'Hitler sur un plan artistique... Alors, mon repentir devrait donc logiquement consister à me repentir d'avoir bien accompli ma tâche...? Pouvez-vous réellement me conseiller de déclarer publiquement que je regrette sincèrement d'avoir trop bien travaillé? Qui me croirait? D'ailleurs, cela va à l'encontre de ma morale professionnelle. Nous ne sommes que des artistes... et rien d'autre ! "

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        Extrait d'un entretien accordé à José Manel infiesta :

        Breker : Après les Olympiades, Hitler avait réuni tous ceux qui avaient reçu une médaille, athlètes et artistes. Par hasard, je fus le dernier à lui être présenté. "Ah, c'est vous qui travaillez d'après les Grecs", me dit-il. J'étais furieux, parce que la presse m'avait déjà accusé de ne faire que des copies, de viles copies. Hitler n'avait vu que la statue de l'exposition. Alors je lui ai répondu : "Non ! D'après la nature." Il m'a regardé un instant, puis il m'a tourné le dos. Ensuite, plus rien. Jusqu'en 1938."

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